Retour en détail sur les objectifs de ce décret pour les IME, FAM, SAMSAH et MAS et analyse des conséquences : budgétaires et autres ...
Ce décret a pour objet, ainsi que le mentionnait le précédent post de Pascal Lefebvre que j'ai partagé, la création d'un traitement de données "sensibles" à caractère personnel relatif à l'activité et à la consommation de soins dans les établissements ou services médico-sociaux.
Je souhaitais néanmoins compléter son propos en analysant les conséquences hors RGPD, et décrypter ce décret en le replaçant dans la perspective globale de l'évolution du secteur médico-social.
Si RESID-ESMS n'est pas totalement nouveaux pour les EHPAD qui remplissaient déjà RESID-EHPAD, c'est une obligation de plus pour le champ du handicap. J'ai donc tout d'abord une pensée émue pour les gestionnaires d'établissements qui n'ont pas informatisé leur dossier de la personne accueillie : ils doivent s'arracher les cheveux en se demandant comment collecter les données nécessaires.
Lorsque le dossier est informatisé, ils peuvent au moins poser la question à un éditeur qui n'a surement pas à ce jour la réponse, mais tout de suite on se sent moins seul ... C'est déjà ça !!
Car lorsque l'on regarde les éléments à intégrer, en dehors des données administratives et des jours de présence, on remarque :
- La nature des prestations servies à la personne par les professionnels médicaux et les auxiliaires médicaux ou appartenant à l'équipe de soins et, le cas échéant, la date d'intervention ;
- Le montant des rémunérations versées aux professionnels de santé libéraux et intégrées dans le budget afférent aux soins de l'établissement ou du service, par catégorie professionnelle, en distinguant, pour les médecins, les généralistes des autres spécialités ;
- Le nom, prénom et numéro d'identification au répertoire des professionnels de santé, le cas échéant des professionnels du secteur médico-social, libéraux prescripteurs ou intervenants au titre de l'établissement ou service médico-social, ainsi que la convention entre ces professionnels et l'établissement ou service.
Pour résumer, il faudra que chaque acte dispensé par un membre de l'équipe de soin au sens de l'article L.1110 du code de la santé publique, soit noté, traduit en coût horaire brut et affecté au patient.
Cela m'évoque bien sûr Serafin-PH mais avec une différence toutefois, puisque la nouvelle réforme tarifaire fait plutôt référence à des coûts complets, intégrants aussi l'amortissement du matériel ou le coût des locaux occupés par le service, alors qu'ici on ne parle que des rémunérations.
Ensuite, pour ce qui concerne les médicaments, dispositifs médicaux et transports, il est demandé :
- Le montant des dépenses de médicaments, de dispositifs médicaux et, le cas échéant, de transports, intégrés dans le budget des établissements et services selon la modalité tarifaire qui leur est applicable ;
Le but étant d'additionner les données obtenues auprès des établissements à celles détenues par les régimes d'assurance maladie, afin de connaître exactement le coût global du soin des personnes prises en charge.
On va retomber aussi sur la sempiternelle question de la récupération des indus, c'est à dire la demande de remboursement par les caisses, des frais médicaux engagés à domicile à l'initiative des familles. Il faut se rappeler que dans ce cas, les demandes de remboursement sont faites à l'établissement et non à la famille.
De plus, depuis l'article 83 de la loi de santé du 26 janvier 2016 : «Si le professionnel ou l’établissement n’a ni payé le montant réclamé, ni produit d’observations et sous réserve qu’il n’en conteste pas le caractère indu, l’organisme de prise en charge peut récupérer ce montant par retenue sur les versements de toute nature à venir».
Donc l'administration n'a même plus besoin de délivrer une mise en demeure pour obtenir le remboursement.
Pour ce qui concerne les transports, c'est un sujet sensible dans le champ du handicap car les coûts font souvent exploser les budgets des établissements; Et cela malgré de nombreuses tentatives de rationalisation et de mutualisation. Elles se heurtent souvent au refus des familles de voir la durée de transport allongée au-delà du raisonnable. Il faut comprendre que les bénéfices d'une séance de kinésithérapie à un enfant polyhandicapé sont amplement diminués par deux heures de transport journalier.
Pour les IME, c'est la totalité des transports qui est à la charge de l'établissement alors que dans les MAS et FAM, ce sont uniquement les transports des externes. Il n'en reste pas moins que les sommes en jeu sont colossales et régulièrement pointées du doigt par le financeur.
Pour en revenir au début de mon propos, j'ajouterais que la prise en compte de ces nouvelles obligations, que ce soit le RGPD, les tableaux de bord ANAP, Serafin-PH, sans oublier la généralisation du DMP ou toutes les autres auxquelles on peut s'attendre, va certainement, à terme, creuser un fossé parmi les éditeurs de logiciels.
En résumé : on verra ceux "qui sCrédit photo: Miguel A Padrinan - Pexelsuivent" ... et les autres !
En tout état de cause, le dossier informatisé de la personne accueillie ne pourra plus être un simple dossier administratif, couplé à une Gestion Electronique de Documents dans laquelle on place toute la partie éducative et sans interface avec la partie médicale.
Et oui : la transition numérique est ... En Marche ... !
Crédit photo: Miguel A Padrinan - Pexels